World Arnis Doblete Rapilon

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De la « Vérité » dans les arts martiaux et des querelles qui s’affichent sur le Web

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Dans la foulée de notre précédent article concernant les publications de vidéos et de commentaires, il paraissait pertinent de s’interroger sur la nature et le statut des divergences de pratiques sans entrer dans les détails ce qui serait un ouvrage digne d’un ornithologue.
En effet, en ligne on voit des « disputes » qui revendiquent des écoles ou des façons de faire, comme on l’a déjà évoqué, et ne manifestent généralement que de simples opinions énoncées à l’emporte-pièce de façon péremptoire.
Nous suggérions de prendre du recul en disant que l’efficacité avait un statut de vérité dans la plupart des commentaires et en affirmant que la Vérité est un inaccessible pour l’homme.
Mais dire que l’efficacité est inaccessible serait trop facile et par trop ridicule.
Il semble, mais ce n’est que mon avis, que pratiquer un art martial c’est apprendre à faire des techniques élaborées selon des principes qu’il est essentiel de cerner.
La différence entre les écoles n’est pas, et est de moins en moins aujourd’hui comme nous l’évoquions, dans les techniques pratiquées. Cela se joue dans les principes et ce qui caractérise ce que nous pouvons comparer à une « doctrine ».
C’est cela que nous évoquerons dans un premier temps avant d’envisager le statut de la « comm’ » dans l’explosion médiatique de cette ère où tout se publie sans médiation, disons plutôt sans filtre.

Les partis pris dans les différents arts et leurs écoles

La pratique d’une école d’arts martiaux quelle qu’elle soit se structure autour de choix, de partis-pris.
Le combat est chaotique par excellence. La seule constante qui le définisse est l’incertitude. Clausewitz dans le Livre I de son traité « De la Guerre » le pose clairement et évoque la dimension du « jeu de hasard » en analogie.
Il en va de même pour le duel (c’est la force de la pensée universalisante de Clausewitz) : Un combat dont l’issue est donnée d’avance est un massacre, pas un combat.
L’art martial n’a qu’une vocation, imposer un savoir-faire aux caprices du « Monde accidentel » comme Aristote se plait à qualifier le Monde sub-lunaire soumis à la contingence et au sein duquel rien n’est parfait, fixe, idéalement réglé.
Il est donc question de structurer le chaos par une réponse technique et une habileté d’artisan, par des comportements fixés sur des principes éthiques (éthos = comportement) qui redonneront un sens à tout cela et permettent d’agir selon des règles qui dépassent l’individu et lui procurent des réponses.
Déontologie et politesse ne sont que des exemples de domaines réglés sur la même mécanique. On en dirait autant de la chirurgie en définitive.

[1] la disputatio étant un exercice rhétorique pratiqué depuis le moyen-âge où l’on tire au sort un « positionnement » que l’on devra tenir face à une doctrine adverse et dans lequel on doit être capable de soutenir tout et son contraire)

sun tzu
Une citation de Sun Tzu figuré ici par un soldat d’argile (alors qu’il était général si tant est qu’il ai existé, bref). Reprit à la sauce managériale ou new age, son Art de la Guerre est cependant une stricte transposition du Tao Te King (pour le voir il faut avoir lu les deux). Le réalisme à dimension cosmogonique, quelle blague ! Tout sauf un livre de recette, un livre de principes

Il en va ainsi de tout art qui choisira, c’est un choix éthique et stratégique, de se spécialiser sur telle ou telle arme, qui prendra le parti de la souplesse ou au contraire celui de l’opposition de force (qui marche aussi très bien n’en déplaise)…
Qui choisira de défendre en préservant ou plutôt d’attaquer…
Qui se plaira à transcender l’adversité en raffinant une technique idéalisée ou, au contraire, cherchera toujours à se remettre en question dans des joutes organisées selon plus ou moins de règles préétablies (on compare trop, à tord et c’est bien ce qui nuit à son développement, la cage du MMA aux arènes des gladiateurs où il y avait systématiquement, et je ne saurais fantasmer sur ces horreurs, des morts et des armes)…

gladiateur
Gladiateur affrontant des animaux sauvages

Chaque art, tout art, est l’expression de la force créatrice de l’homme qui se fixe sur les principes qu’il a défini sur la base de sa réflexion sur le Monde tel qu’il parvient à le concevoir.
Le principe d’efficacité étant principe de raison suffisante, si ça marche et que ça colle aux partis pris, c’est validé. Mais rien ne prouve qu’une façon de faire différente ne sera pas tout aussi fonctionnelle.
Prenons la corrida (c’est un exemple pas une revendication) : il y a l’Arène et il y a la Mort, c’est pourquoi je prends cet exemple suffisamment proche des principes et éloignés de nos représentations coutumières.
Le grand art en la matière est d’y affronter le taureau (on a beau ne pas aimer, il faut du courage pour y aller) et de réussir à faire des passes connues du public, d’y ressortir des techniques plus ou moins périlleuses et apprises, pas juste de « buter le bestiaux »…fin de l’analogie.
Nous tous jugeons, souvent trop vite, souvent sans chercher à comprendre ce que font les gens. Je ne dis pas qu’il faut adhérer à tout ou tout prendre sur un pied d’égalité. Cela reviendrait à dire que le nazisme est une doctrine comme une autre et qu’il n’y pas à la comparer aux autres…(ne pincez pas votre nez, le relativisme culturel est l’archétype de la bien pensance aujourd’hui et ce depuis longtemps déjà, il est souvent aussi l’argument de ceux qui défendent la corrida pour prendre à nouveau un exemple inconfortable).
Bien sûr qu’il faut choisir ! Mais il faut choisir en connaissance de cause. Cela implique de chercher à comprendre avant tout et de ne surtout pas oublier qu’on ne peut jamais faire qu’un choix, exprimer une préférence, entre différents « possibles ».
Trivialement mes maîtres me recommandent de ne pas défendre à coups de pieds sur un couteau et m’ont convaincu. Pourtant, jadis agent de sécurité, j’ai connu quelqu’un qui s’est débarrassé d’un agresseur armé d’un coup de pied au visage. Bah ça a marché…et après ?
Nous ne pouvons que faire des choix fondés sur des certitudes somme toutes relatives, des principes fondateurs…ce qui est, en même temps, une formidable source de richesse inépuisable …

Qu’est-ce que montrent les vidéos ?

Souvent je me suis fait embarquer dans des polémiques autour de commentaires sur des vidéos relatives aux arts martiaux alors que je parlais d’autre chose.
Une fois j’ai fustigé une vidéo montrant des blessures infligées par un agresseur au couteau et que chacun commentait du point de vue « technique ». Je me révoltais quant au fait qu’on ne savait rien de la situation (pourquoi ces coups de couteau ?) ni de la survie éventuelle de la personne…On n’y apprenait qu’un couteau coupe ? La belle affaire !
Une autre fois une polémique autour de vidéos qui promeuvent le JJB et ses étranglements dans un contexte qui me choque : des femmes harcelées ou clairement agressées sexuellement feignent de se soumettre avant d’étrangler un adversaire.
Quid de l’image de la femme, qu’elle réflexion autour de la situation traumatisante du viol ou même que dirait-on face à un juge ?…infâme ! « Mesdames, jouez le jeu et endormez le »…la technique, ou même la stratégie, n’avait rien à voir là-dedans…elle était très bien, là n’était pas la question, je me fichais des arts martiaux dans ce contexte…et j’étais le seul !

Pourquoi ces exemples ? Parce que ces vidéos doivent être prises pour ce qu’elles sont :
De la « réclame » (je préfère à pub sur ce coup là, à escient)
De la réclame pour une discipline.
De la réclame pour un club, une tentative de « buzz »…
Un partage intentionné montrant un cours ou un ensemble de techniques (cela s’adresse souvent aux disciples comme les livres d’arts martiaux dans lesquels on n’apprend pas l’art mais le révise)…
De la réclame pour un livre ou un DVD, quelque chose de somme toute bien légitime et qui s’adresse aux futurs acheteurs…de la « promotion » !

Parfois, ce sont aussi des pratiquants, débutant (personnellement, je ne suis même pas encore à la moitié du chemin) qui se filment par narcissisme et publient…
Et font rire…
De même qu’il est malheureux de mettre en ligne les premiers entrechats disgracieux de sa fille sur Facebook pour que mamie les voit car cette séquence deviendra l’inexpugnable malédiction (le « dossier ») de cette pauvre petite, quelle devienne étoile ou non d’ailleurs, c’est peut-être à nous, professeurs, de calmer, certaines ardeurs.

Mais rire de cela n’est-il pas aussi incongru que cruel finalement ?
Même si on sait que rire de la gamelle d’autrui nous rassure et que c’est un sale « réflexe », est-il judicieux de le faire « aux éclats » ?
Puisque chacun d’entre nous a commencé par tomber avant de réussir à marcher, faut-il condamner à la vindicte publique virtuelle ce qui ne devrait, finalement, recevoir pour critique qu’une bienveillante condescendance exprimée par un silence poli ?

Discussion de comptoir ou polémique ?

Alors quoi faire, quoi dire des commentaires, que penser de ces vidéos ?

Que la critique est plus facile que l’art ?…
Qu’on nous dit depuis tout petit qu’il ne faut pas parler sans savoir, sans connaître ?…
Que si les plus expérimentés, les plus sages d’entre nous, les Maîtres, ne se querellent pas en ces forums immatériels, c’est que l’humilité dans les arts martiaux commence peut-être là.

La seule vérité se décrétera sur le champ de bataille ou dans l’arène et comme le disait très justement à ce propos mon premier professeur de boxe thaïlandaise :
« on a la ceinture un an mais en vrai, on est champion pendant 45 mn. Demain, ça aurait probablement été lui »…

Fabuleuse sagesse des anciens !

Respectons donc le travail, apprécions la recherche de chacun qui nous confortera ou non dans nos propres choix.
Et n’oublions pas (surtout en tournant) que toutes ces pompeuses démonstrations ne sont que des partages privés de souvenirs entre amis sur la voie publique qu’il est inutile de juger publiquement ou, plus souvent, qu’il s’agit de contenus à caractère promotionnels que la modernité condamne chacun d’entre nous à produire.

Ce n’est que de la « réclame » en définitive, et on ne critique dans une publicité que son caractère provoquant ou vulgaire (comme les exemples évoqués plus haut), car cela a peu de sens de faire, là, le procès de la qualité intrinsèque du produit qu’elle a pour vocation de vanter. On l’achètera ou pas, le recommandera ou non…voilà tout.

Le règne du commentaire, souvent anonyme, est donc plutôt à mépriser face au courage qu’a celui qui, fut-il ridicule dans ce qu’il avance, assume ce qu’il publie.

Et oui il y a un droit à la critique, mais est-il judicieux de la rendre publique ?

De la source authentique de l’autorité (considérant que les réels auteurs sont les fondateurs d’écoles plus que les écrivains de commentaires…)

Un foisonnement d’opinions n’a pas de valeurs, les disputes des maîtres (en sciences notamment), oui.
Kant parlait à ce propos (dans son traité sur la Paix perpétuelle) de « Guerre »…mais c’est l’Université et la communauté scientifique qu’il a en tête ! On est loin de Youtube !

Alors on peut bien nous vendre à force de clips et de formations vidéos en ligne la supériorité du coup de latte dans les pudenda en matière de self défense…
On nous fera des démonstrations d’Aïkido en jeans avec immobilisations et des finitions par frappe en s’amusant que, de fait, ce n’est plus de l’Aïkido…
On nous expliquera çà ou là avec verve qu’il est inefficace de se défendre à mains nues contre un couteau avant de nous montrer comment on fait soi-même alors que, quoiqu’il arrive, bah un mec armé aura toujours l’avantage, hein, sinon on aurait abandonné les armes …
Et puis si les karatéka qui travaillent dans une distance de sécurité et font de la compétition de pieds-poings ne travaillent pas sur saisies, ça se tient, non ?
Puis à l’heure de la surenchère et de la suprématie de l’efficacité sur le fond on tâchera, au moment de faire son choix de pratiquant, de ne pas oublier que le nazisme (autre exemple inattendu et déplaisant de doctrine) que j’évoquais tout à l’heure a, très malheureusement, fait preuve d’une grande efficacité en son temps.
Si bien qu’un peu de vertu ou de réflexion dans la pratique ne peut pas non plus faire de mal puisque le pire peut aussi être efficace.

Les grands maîtres, les hauts gradés, semblent très à l’aise avec leurs choix et il n’est pas rare qu’on entende dans leur propos un subtil distinguo entre « la bagarre » et le « Budo ».
On pourrait en passant se demander ce qu’aurait d’ailleurs dit O Sensei Ueshiba, qui a pourtant tué des gens à la baïonnette, des films de Steven Seagal pour reprendre un exemple caricatural.

Ils savent ce qu’ils enseignent, connaissent les raisons profondes de ces choix qu’ils incarnent au sens propre du terme.
Et nous, les disciples avons choisis, comme en philosophie, de suivre tel ou tel maître. Telle ou telle voie. Elle est sportive, spirituelle, mystique, martiale…il y a vraiment de tout.
Faisons nous une opinion : c’est nécessaire, je dirais presque vital.
Mais l’opinion est le fruit d’un choix qui nous appartient et qui n’a nul besoin, en définitive, d’être crié à la face du Monde, dans le brouhaha de l’offre incroyablement variée et exotique dont on jouie désormais dans le monde des arts martiaux.
Car si la confrontation des idées permet à chacun de choisir une doctrine, du foisonnement d’opinions il ne ressort que du « bruit ».

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